Lorsque l’on cherche à protéger une marque, doivent être sélectionnés le signe et les activités (produits/services) en relation avec lesquelles la marque sera utilisée.
Les produits et services pouvant être visés lors du dépôt sont répertoriés dans une classification administrative, la Classification de Nice, adoptée par un grand nombre de pays et d’offices, mais qui l’appliquent de façon parfois bien différente.
Cette classification comprend 45 classes, chaque classe étant composée d’une liste alphabétique parfois très longue de produits ou services, ainsi que d’un intitulé, sorte de résumé non exhaustif des catégories générales représentatives du contenu de la classe.
Même s’il est parfois difficile de prévoir au moment du dépôt de la marque quel sera son devenir dans quelques années, il est important de réfléchir au moment du dépôt à ce que l’on souhaite faire de sa marque à court ou moyen terme pour optimiser sa protection et en permettre une défense efficace.
Mais il faut également bien connaître la pratique des offices devant lesquels seront déposées les marques en matière de désignation des produits et services, car cela conditionne la portée de protection de la marque.
Ainsi, aux Etats-Unis, ne peuvent être visées des catégories générales, mais seulement les produits et les services selon leur désignation courante dans le commerce, compréhensible par tous.
En Corée du Sud, les produits doivent être listés très précisément (les chaussures par exemple constituent une catégorie trop générale, et chaque type de chaussure doit être détaillé).
Au Japon, la désignation d’un intitulé de classe est permis, mais la marque devant être utilisée dans un futur proche, l’examinateur peut émettre un refus provisoire s’il estime peu vraisemblable que le déposant exploitera la marque pour l’ensemble des produits couverts.
En Europe, la situation était plus confuse : la portée d’une marque visant un intitulé de classe variait d’un office à l’autre. Certains, comme l’INPI (office français), avaient une approche littérale du libellé (n’étaient protégées que les catégories visées et les produits et services qu’elles recouvrent) ; d’autres, tel l’OHMI (office des marques communautaires), privilégiaient une approche interprétative, estimant qu’en reprenant le résumé de la classe, le déposant entendait protéger sa marque pour tous les produits et services inclus dans cette classe.
Depuis un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (aff. C‑307/10, IP TRANSLATOR, 19 juin 2012), il est établi que :
– la désignation d’un intitulé de classe est permise pour autant qu’une telle identification soit suffisamment claire et précise pour permettre aux tiers de déterminer la portée de protection ;
– le demandeur d’une marque nationale qui utilise toutes les indications générales de l’intitulé d’une classe doit préciser si sa demande vise l’ensemble des produits ou des services répertoriés dans la liste alphabétique de cette classe ou seulement certains de ces produits ou services.
Les offices qui avaient adopté une approche interprétative ont donc dû modifier leur pratique.
L’office des marques communautaires avait initialement donné aux déposants la possibilité de continuer à viser les intitulés de classes tout en accompagnant le dépôt d’une déclaration selon laquelle la protection était demandée pour tous les produits ou services rangés dans cette ou ces classes.
Mais le principe de cette déclaration étant contraire à certains accords internationaux, le déposant qui entend viser l’ensemble des produits et services d‘une classe devra désormais énumérer la liste alphabétique intégrale (et souvent interminable) de ces produits et services. L’encombrement des registres sera un moindre mal au regard de la sécurité juridique que procure désormais cette pratique, qui permet à tout un chacun de connaître l’étendue de protection de ces marques.
En revanche, la portée des marques communautaires déposées antérieurement au 21 juin 2012 et qui désignaient des intitulés de classe sans autre information est devenue très incertaine. Invoquées devant des offices nationaux à l’encontre de marques nationales, il appartiendra à ces offices de déterminer en dernier ressort l’étendue de protection sur leur territoire.
Il est donc fortement conseillé aux titulaires de ces marques de préciser leur intention au moment du dépôt, soit en restreignant le libellé, soit en visant nommément tous les produits ou services dépendant de la classe.
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Cet article a également été publié sur le Village de la Justice.