Ce n’est pas du Marcel Pagnol, mais la saga provençale de la protection du Savon de Marseille se poursuit d’épisode en épisode et ne semble toujours pas parvenue à une fin.
En juillet 2013, nous expliquions pourquoi le savon de Marseille n’est pas forcément marseillais (ici). En mars 2016, nous pensions que le Savon de Marseille serait peut-être la première appellation à bénéficier du nouveau régime de protection des IGPIA ou indications géographiques protégeant les produits industriels et artisanaux (ici).
Rappelons en effet que la loi N°2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation a étendu le régime des indications géographiques aux produits industriels et artisanaux (articles L721-2 à L721-10 du Code de la propriété intellectuelle). Selon l’article L721-2, « Constitue une indication géographique la dénomination d’une zone géographique ou d’un lieu déterminé servant à désigner un produit, autre qu’agricole, forestier, alimentaire ou de la mer, qui en est originaire et qui possède une qualité déterminée, une réputation ou d’autres caractéristiques qui peuvent être attribuées essentiellement à cette origine géographique ». Nous avions présenté ce nouveau dispositif comme visant à protéger des savoir-faire industriels nationaux, régionaux ou locaux (ici).
Mais voilà, la demande d’homologation IG 15-002 présentée par l’Association des fabricants de savon de Marseille le 16 juin 2015 semble ne pas avoir abouti. L’enquête publique a été clôturée en décembre 2015 et depuis, rien.
Rien ? Pas tout à fait.
Une demande d’homologation IG 15-003 a été présentée le 22 décembre 2015 par l’Union des professionnels du Savon de Marseille. Elle n’a vraisemblablement pas abouti non plus dans la mesure où la dernière enquête publique a été clôturée le 12 juin 2016, sans pour autant que l’IG ait été homologuée par l’INPI depuis cette date.
Et ce n’est pas fini…
Une nouvelle demande d’homologation de l’IG Savon de Marseille a été présentée le 2 septembre 2016 par l’Association française des industries de la détergence. Répondant à une demande de régularisation, un cahier des charges modifié a été déposé le 2 décembre 2016 au nom de l’Association Savon de Marseille, alors en cours de formation, tandis que le nouveau cahier des charges indiquait comme organisme de défense et de gestion l’Organisme de défense et de gestion savon de Marseille.
Pour l’INPI, il est intervenu en cours d’instruction une modification du demandeur et, s’agissant d’une association en cours de formation dont les statuts étaient sujets à modification, l’INPI ne pouvait s’assurer du critère de représentativité que la loi lui impose de vérifier.
La demande d’homologation a en conséquence été rejetée et, le 15 décembre 2017, la Cour d’appel de Paris (pôle 5, 2e ch., RG 2017/03574) a rejeté le recours formé contre cette décision par l’association Savon de Marseille France, l’Association Française des Industries de la Détergence et les sociétés Laboratoires Provendi et Savonnerie de l’Atlantique.
Observons que l’INPI avait en outre considéré que le cahier des charges présenté était incomplet notamment en ce qu’il ne précisait pas « la qualité, la réputation, le savoir-faire traditionnel ou les autres caractéristiques que possède le produit concerné et qui peuvent être attribués essentiellement à cette zone géographique ou à ce lieu déterminé ainsi que les éléments établissant le lien entre le produit et la zone géographique ou le lieu déterminé associé ».
Autrement dit, le savon de Marseille est sans doute toujours un savon mais il n’est toujours pas marseillais… La suite au prochain épisode.
En attendant, seules trois IGPIA ont été officiellement homologuées : le Siège de Liffol, le Granit de Bretagne et la Porcelaine de Limoges.
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