Aquarelle et Flora Jet sont deux sociétés dont l’activité est principalement la vente de fleurs sur internet. Pour la promotion de leur activité, ces sociétés mettent en ligne des photographies de fleurs et de bouquets censées inciter les internautes à l’achat.
Estimant que Flora Jet avait publié sur internet, après quelques retouches mineures, des photographies extraites de son propre site, Aquarelle l’a assignée en contrefaçon de droit d’auteur et en concurrence parasitaire.
Contrairement à une affaire commentée en 2013, les conseils d’Aquarelle ne sont pas tombés dans le piège de revendiquer des droits d’auteur sans faire l’effort de caractériser l’originalité des œuvres en cause. Etaient ainsi décrites plusieurs caractéristiques de chacune des photographies aux débats mais également les choix esthétiques et techniques retenus par le photographe.
Cependant les arguments de la demanderesse ne suffirent pas à convaincre le tribunal de ce que les œuvres portaient réellement l’empreinte de la personnalité de leur auteur (Tribunal de grande instance de Paris, 3ème chambre, 2ème section, 29 janvier 2016). Au contraire, il fut relevé que les photographies « ont été prises par un photographe faisant état d’un simple savoir-faire technique, non protégeable par le droit d’auteur, dès lors qu’elles sont dénuées de partis pris esthétiques et de choix arbitraires (absence de décor, de lumière ou mise en scène particulière) qui leur donneraient une apparence propre ». A également été mis en avant le caractère usuel des techniques de cadrage et de mise en lumière et la banalité des représentations en cause, s’agissant de bouquets similaires à ceux présentés sur de nombreux sites internet concurrents.
L’action en contrefaçon ne pouvait prospérer. Pas plus que les demandes du chef de la concurrence parasitaire qui, d’après le tribunal, reposaient essentiellement sur le fait d’avoir fait usage de clichés certes similaires mais non porteurs « d’une valeur économique intrinsèque » en raison de leur banalité (et en l’absence de justificatifs d’investissements importants d’Aquarelle en matière photographique).
Il s’agit ici seulement d’une décision de première instance qui fera ou fait déjà peut-être l’objet d’un appel. Cela étant, cette affaire illustre assez bien la problématique esthétique du e-commerce et de la promotion de produits en ligne.
Ce mode de commercialisation suppose la mise en ligne de photographies les plus fidèles possibles aux produits mis en vente afin de permettre « à l’acheteur d’être par la suite satisfait de son acquisition », selon la formule du tribunal. Il faut également éviter autant que possible les informations parasites tels que les décors, les fonds, les seconds plans, etc. Il arrive même que ces packshots soient réalisés par des studios photos automatisés au centre desquels le produit est simplement posé pour être photographié sous tous les angles. En fait, l’objectif est que la photographie soit la plus simple possible, la plus lisible ou parlante, afin qu’elle fournisse une description claire du produit.
Force est de constater que ces exigences ne sont pas compatibles avec une créativité débridée du photographe.
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La décision commentée a fait l’objet d’un appel. Voir notre article ici.